Extrait
« Le chaos régnait dans ce petit appartement de l’avenue du Parc. Mme Kelman n’avait pas pris part au cortège jusqu’au centre-ville. Mme Kelman, quatre jours complets durant, avait cuisiné dans un état de frénésie. Mme Kelman aimait la nourriture. Dire qu’elle aimait la nourriture est, cependant, un flagrant euphémisme. Dire que Mme Kelman adorait la nourriture serait encore un euphémisme. Mme Kelman, du haut de ses cinq pieds et trois pouces, devait peser entre deux cents et trois cents livres. Son mari, Fishel Kelman, était tout aussi trapu. Les murs de leur appartement étaient recouverts de photographies de toutes ses années de champion de boxe à New York. Il avait combattu Abe Attel, Benny Leonard et Kid McCoy – trois bons garçons juifs. Mais les photos de Fishel au mur donnaient toutes à voir un poids coq ou un poids mouche, au mieux un poids léger, et M. Kelman sous la tutelle attentive de sa femme était maintenant énormément obèse : une montagne d’homme. S’il n’avait pas eu ces photos pour le prouver, personne n’aurait cru un seul mot
au sujet de sa carrière.
»